Natura Loci, la « nature du lieu » : ces deux termes mariés renvoient par analogie au concept de Genius Loci, de « génie du lieu ». Tout comme chaque lieu, chaque endroit, chaque place ont leur « génie » propre, propice à les distinguer, il en va de même pour ce qui est de leur « nature ». S’intéresser à la « nature » du lieu (plus qu’à son « génie » réel ou supposé) suppose toutefois que l’on s’éloigne du préjugé et de toute approche sublimée. Pour se concentrer, au plus près, sur le lieu lui-même : ses spécificités multiples, son paysage, son cadre de vie, sa population.
« Natura Loci »– l’exposition – prend place au creux d’un village de Haute-Gaspésie, Sainte-Madeleine-de-la-Rivière-Madeleine, signalé par son caractère fort.
La Haute-Gaspésie, territoire dur, malmené par le climat, est un univers où la vie s’enracine avec ferveur mais aussi avec difficulté. Un tiers des habitants, depuis trente ans, ont quitté Sainte-Madeleine, bourgade typique de la vie gaspésienne et de ses rigueurs. Si l’activité économique y demeure notoire (bûcherons, sciage du bois, chasse, pêche, tourisme), elle n’est pas sans connaître des aléas et des tensions, au risque de la déshérence. Ce territoire, loué volontiers pour sa beauté supérieure (la « nature » y est triomphante, sauvage, omniprésente), est un rocher auquel l’homme s’accroche de haute lutte. Ici plus qu’ailleurs, il ne faut pas se suffire du « paysage » mais, plus intensément, le vivre, l’expérimenter.
Avec « Natura Loci », le Magasin Général Studio international en création multidisciplinairede Sainte-Madeleine-de-la-Rivière-Madeleine met en valeur les créations plasticiennes de trois artistes en résidence, en amont de l’exposition elle-même, Patrick COUTU,Michel DE BROINet Séverine HUBARD, deux Canadiens et une Française donc, pour les convier à travailler à partir du territoire local. Une invitation a également été faite à l’artiste new-yorkaise Janet BIGGS, récente lauréate d’un Guggenheim Award, afin de présenter sa vidéo Warning Shot, une alerte contre le réchauffement climatique et la dégradation environnementale qui affecte notre Planète.
La nature, le paysage, le présent, la mémoire, la vie matérielle, tout ici est prétexte à création, à « artialisation », au terme d’une période de proximité mettant l’artiste au contact du lieu et de ses habitants. Les artistes invités (à l’exception de Janet Biggs, dont le propos est plus universel, quoique non désolidarisé des problèmes que connaît la Haute-Gaspésie) œuvrent à partir du contexte local et en fonction de celui-ci. Une interrelation entre la création et le lieu est attendue, justifiant le principe de la résidence. L’art échange avec l’environnement gaspésien, et vice-versa.
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