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La terre maillant Poétique de la plantation par Paul Ardenne
« Au niveau le plus fondamental, il nous faut repenser la relation entre la forme et le processus. » Tim Ingold, Marcher avec les dragons
« Les formes de l’écologie ont résolument besoin de nouveaux récits pour se régénérer. »
Ainsi s’exprimait la spécialiste de l’art dit « écologique » Bénédicte Ramade il y a encore peu (en 2015), en conclusion d’une recension, pour la presse spécialisée, de plusieurs expositions d’art contemporain « vert » de la période récente 1. Qu’entendait par-là, quelque peu désabusée, cette historienne de l’art canadienne particulièrement au fait de la question 2 ? L’art environnemental, celui qui trouve sa vocation dans la défense de l’environnement et la lutte contre son actuelle dégradation, a le plus grand mal à dépasser le stade du constat, du document. Cela même, quand il ne tombe pas, plus pauvrement encore, dans l’anecdote : tel artiste récupère des sacs de plastique et en fait une montgolfière (Tomás Saraceno 3), tels autres maculent de terre sale une vieille pompe à essence (Jennifer Allora & Guillermo Calzadilla 4), la résidence d’un artiste dans la zone longtemps utilisée comme une décharge publique de Jamaica Bay, près de New York, se traduit par l’exposition dans un musée de choses trouvées sur place, déchets, éléments végétaux, minéraux (Tue Greenfort 5)… L’art environnemental manquerait-il d’imagination ? À telle enseigne, ne parlons pas de cette facilité légitimement décriée, la sublimation de la saleté, tant et plus traduite dans de belles images photographiques empruntées aux catastrophes naturelles, photogéniques car toujours spectaculaires (Daniel Beltrá, Nadav Kander, Mick Epstein…). Et pas plus, de la vogue devenue inusable du documentaire dit « d’exposition », qui n’en finit plus d’essaimer depuis les années 1990 — un genre intéressant par ses contenus mais devenu académique, trop porté de surcroît à donner des leçons de civisme, et dont les prétentions morales peuvent déranger.
Quoi donc, en tout et pour tout ? Une offre trop descriptive, trop esthétisante ou trop rhétorique, encodée dans des pratiques à présent figées à force d’être reconduites sur un mode routinier.
Le choix de l’activisme
Souhaiter l’émergence de « nouveaux récits » à toutes fins que l’art environnemental se « régénère », suggère donc Bénédicte Ramade. Est-ce toutefois si facile ?
Le problème, en vérité, pourrait bien résider dans la vocation immémoriale de l’art à représenter le monde, plutôt qu’à l’incarner. Dans la stratégie même du paraître, de la restitution, de l’interprétation figurative ou symbolique qui forme le socle de l’expression artistique. Décider, artiste, de rendre compte de la dégradation actuelle de nos écosystèmes, des méfaits de la surexploitation humaine de nos milieux de vie, des menaces engendrées par l’anthropocène est sans conteste une forme d’engagement respectable : la plus pressante qui soit, au demeurant, à en juger par les actuelles priorités de l’humanité, écologiques de fait. Le problème, c’est le comment. Plus rudement signifié : toute la difficulté de cette entreprise, supputons-le, pourrait bien résider dans l’impossibilité de l’art même, du fait de sa poétique propre, à s’extraire de l’évocation. À être autre chose qu’un regard sur le monde exercé depuis le dehors — le regard de l’éternel spectateur.
En finir avec l’artiste-spectateur du monde : cette option radicale, la modernité va l’estimer viable. Les années 1960, de la sorte, intronisent un nouveau type d’artiste, dit activiste ou mieux encore, par contraction des deux mots « art » et « activisme », «artiviste»6. Quelle position l’« artiviste » adopte-t-il ? À la « forme » (l’image, la figure expressive, le document), ce créateur las d’être un simple témoin entend ajouter voire substituer l’action concrète, en coeur de contexte (art « contextuel »). Revenons à l’art environnemental. Pour l’artiviste qui s’engage dans le combat écologique, la création en passera dorénavant par l’action de terrain. Son choix, ce ne sera pas juste « représenter » les heurs et malheurs de l’environnement aux prises avec sa dégradation croissante et les effets de la surexploitation humaine des écosystèmes. Mieux que cela, va estimer l’artiviste : ce sera agir avec l’environnement, dans celui-ci, pour celui-ci.
L’artiste-écologue
Un des artivistes les mieux repérés, depuis un demi-siècle, est l’artiste « écologue », celui qui s’applique à l’écologie pratique, en direct, qu’il se fasse jardinier, horticulteur, agriculteur, nettoyeur ou aménageur. Créer pour l’environnement, pour cet acteur qui se retrousse les manches, passe par l’intervention directe « sur » le paysage : en lui, dans sa substance physique et sociale.
Si la Terre est bien un jardin dont nous avons hérité (le « jardin planétaire » cher à Gilles Clément7) avant de le saccager comme des sauvages, alors la mission de l’artiste-écologue est définie d’office : ce que les pratiques humaines ont dénaturé, on le renature. Quelques exemples de cette renaturation en actes. En 1981, en pionnière du genre, Patricia Johanson aménage à Dallas (Fair Park Lagoon, 1981-1986) un périmètre laissé à l’abandon en bordure d’autoroute, dont elle fait un jardin. Quinze ans plus tôt, Alan Sonfist, à New York, a obtenu déjà qu’un périmètre urbain soit laissé à son libre développement naturel après qu’on y a replanté des espèces végétales de l’âge précolonial, l’occasion de voir revenir dans Big Apple des végétaux que l’urbanisation avait chassés (Time Landscape, 1965-1978-aujourd’hui). En 1982, Joseph Beuys, en Allemagne, plante 7 000 chênes avec la population de Kassel (7000 Eichen), et Agnes Denes, dans le Lower Manhattan, un champ de blé dont le fruit de la récolte sera reversé à des associations de lutte contre la faim dans le monde (Wheatfield. A Confrontation). Kathleen Miller, engagée dans une véritable guérilla écologique, bombarde les territoires ruinés par l’industrie chimique de grenades de terre humide chargées de graines (Seed Bombs, 1992) tandis que Mel Chin ouvre le cycle de ses Revival Fields (1991-aujourd’hui8), ses « champs du renouveau » : des parcelles ensemencées, dont l’ordonnancement des massifs évoqueune composition picturale minimaliste, au moyen d’espèces végétales ayant le pouvoir de capter la pollution du sol. Dans l’Hudson River, pour lutter contre la dégradation de cette grande artère fluviale, Buster Simpson immerge des blocs de calcaire absorbant une partie des toxiques (Hudson River Purge, 1983). En adeptes du cleaning, Mierle Laderman Ukele, Ha Schult et Marina DeBris nettoient villes, campagnes et plages pour en recycler les détritus, qu’ils transforment en oeuvres d’art (les vêtements dits Trashion de DeBris, faits avec des morceaux de plastique récupérés) tandis que le tandem Helene Mayer et Newton Harrison crée des fermes pilotes en matière de biodiversité et de protection des espèces menacées avec le soutien actif de biologistes et de militants du développement communautaire (Full Farm, 1974).
Cette liste, pour fort incomplète qu’elle soit, informe sur une mutation considérable, en termes de création même, voyant l’expression se lier à l’action et l’engagement mental, bien souvent, se corréler à l’engagement humanitaire. Précisons que nombre de ces entreprises sont collectives. L’artiste se fait connecteur, il oeuvre volontiers avec les populations locales, il se défait des oripeaux romantiques de son génie présumé et redescend sur le sol du réel, en tournant le dos à la posture idéaliste. Acteur oui, mais dans l’esprit d’une culture des « multitudes »9, des « communs »10, propice à profiter au plus grand nombre. Bienvenue, en somme, dans l’ère de ce que les spécialistes appellent dorénavant l’« art utile », le Useful Art, lointain héritier du réalisme de Gustave Courbet. Pour finir, on a échangé le pinceau contre la pelle.
Un rapport renouvelé aux plantes
Entre les formes d’art environnemental activiste engagées pour l’écologie concrète, la plus représentative est sans conteste celle des planteurs, dans la lignée ouverte par Johanson, Beuys, Denes, Chin ou Mayer Harrison. De l’action des artistes-planteurs naît cette forme nouvelle, jardinière, agricultrice, de pratiquer l’art, une poétique de la plantation. Celle-ci, on le pressent, se nourrit à son orée d’une attention intense portée à la végétation et par extension, au monde biologique et minéral (triade plante-animal-terrain). Le but n’est pas la seule renaturation exercée là où la nature a perdu ses droits. Un idéal de restauration écologique contre-humaine préside le plus souvent aux actions des artistes-planteurs : rétablir l’environnement dans ses droits, le déshumaniser, se positionner contre l’action anthropique destructrice des milieux. L’artiste-planteur ne confectionne pas un jardin extraordinaire, il reconstitue un milieu 11.
Il importe de dire plus qu’un mot, à cette entrée, de l’amour profond des plantes, de la haute connaissance des végétaux caractéristiques de l’artivisme planteur. Rien de nouveau il est vrai, dans le champ de l’art, à cet amour des plantes. Nombre d’artistes, dès avant l’âge classique (c’est avec la Renaissance que l’intérêt pour la flore s’affirme de façon scientifique12), se sont fait une spécialité de l’art dit « botanique », où l’on dessine et peint des végétaux avec un luxe de précision, dans le style des catalogues des muséums d’histoire naturelle. Au dessin, à la peinture des végétaux, certains artistes vont cependant préférer l’exposition même des plantes, qui deviennent des objets d’art à part entière. De nombreux artistes plasticiens, avec la fin du 20e siècle, disent ainsi leur dévotion aux plantes de la manière la plus simple qui soit : en les exposant telles quelles. Cette fois, à la différence de l’art dit « botanique » évoqué à l’instant, la plante même fait l’objet d’une présentation en plus haut lieu, galerie d’art ou musée, à l’état « de nature ».
Exemple avec Richard Solomon (États-Unis), sculpteur végétal connu comme le « chamane des semences ». Artiste de la découverte et de la collecte des végétaux, son aire de travail est, au Nouveau-Mexique, la nature et sa végétation se développant près de chez lui, à Ilfeld. Richard Solomon, avec sobriété, met en valeur les productions de la nature quasiment telles quelles, en une forme d’hommage et d’admiration. « Les plantes sont une tribu vivante, une tribu indigène. Les plantes voient la vie différemment. Elles ont des coutumes différentes. Elles parlent une autre langue. Mon art est une tentative de traduction de leur langue afin que la véritable histoire de la planète puisse être racontée. Chaque graine, la racine ou la gousse contient l’histoire de la Terre », dit l’artiste. Les compositions de plantes de Richard Solomon sont sobres, sans emphase, fragiles même — à l’image de la fragilité qui est celle des plantes à l’heure de toutes les extinctions et de toutes les monocultures que génère l’économie néolibérale globalisée caractéristique de la fin du 20e et du 21e siècles. Un herman de vries, récemment disparu (en 2016), n’aura pour l’essentiel pas procédé autrement, dans une même veine où lire d’abord le respect dû à la plante. Connu comme un des animateurs du groupe Zero (1957-1966), un collectif d’avant-garde partisan d’une peinture informelle et élémentaire, son intérêt pour la nature se décèle plus clairement à partir des années 1980 et va se traduire par l’exposition, en général élémentaire, d’éléments glanés tels qu’herbes, fleurs, pierres, bouts de bois et autres graines… herman de vries (qui refusait d’écrire son nom avec les majuscules : ne pas se dissocier du reste des choses et des êtres, demeurer commun plutôt que spécifique) limite son geste d’artiste au maximum : mise en scène, agencement, documentation,sans jamais prendre le dessus sur l’objet naturel.
Le lien à la Terre
Les artistes « végétalistes » (en matière de création) que nous citons, dans leur rapport à la plante, se positionnent en amis, ils font résolument valoir une philia, cette amitié profonde que l’on va retrouver dans la performance Tree Pose de l’artiste néerlandaise Linda Molenaar, réalisée pour la première fois en 2011. Celle-ci a recouvert sa peau d’une combinaison faite de fragments d’écorce puis prend position, immobile trente minutes durant, le sommet de sa tête appuyé contre le tronc d’un grand arbre. Espérance d’une transfusion ? D’un devenir arbre ? L’artiste précise, sobrement : « Leaning with my head to a tree for 30 min. 13 » Tree Pose est une performance notoire pour cette raison d’abord, l’intensité du lien avec le monde naturel qu’on y décèle, son fort potentiel au registre de l’Earthbound, du « terrestre » en son sens élémentaire du « lien à la terre ». L’artiste, dans ce cas, fait bien plus que représenter la nature ou qu’offrir au regard ce qu’elle produit. Elle consent, sur un mode de renonciation à soi, à abdiquer autant que faire se peut sa pars humana, sa spécificité humaine, pour faire valoir en retour une tout autre spécificité, celle d’un être non pas hybride (humain- naturel) mais si possible et dans ce cas précis, arbustif. Je renonce à l’humanité pour me faire arbre.
Toute poétique de la plantation, à l’instar du glissement ontologique propre à Tree Pose, voit l’artiste donner à la plante et à son milieu d’expansion une importance considérable, une importance, disons-le, supérieure à celle qu’il s’accorde sans doute à lui-même. L’âge écologique, à cet égard, a ceci de particulier qu’il consacre indéniablement un recul de l’humain, au bénéfice du non-humain. Anthropo-scepticisme ? Cela se pourrait bien. Comment l’humain, dans ce cas, est-il perçu ? Comme cette espèce imparfaite que la nature, au fond, a ratée. Un lapin vit sans hôpital, sans école, sans système de production. Une fougère n’a nul besoin d’un toit pour naître, croître et se développer. Un marsouin ne requiert pas de vêtements et encore moins de mode vestimentaire. Un ver de terre n’a pas d’académie. Le monde non-humain ? Il fait la preuve de sa supériorité, à travers ses vertus d’adaptation, là où le monde humain vit sans répit de mutations, de constantes reconfigurations, qu’elles soient économiques, sociétales, relationnelles, intimes. Ce qu’expriment particulièrement les curieuses performances organisées, à partir des années 2010, par un Boris Nordmann. Il peut y être demandé, à des intervenants réunis pour la circonstance, d’essayer d’incorporer mentalement et physiquement, dans leur esprit, dans leur chair, toutes les qualités biologiques, par exemple, d’une araignée 14.
Contre le plantationocène, la plantation
Revenons à nos artistes-planteurs. Ceux-ci, avec le 21e siècle, se font plus nombreux. Leurs manières d’opérer sont diverses. Un Tattfoo Tan, promenant des caddies emplis de plantes, installe ces dernières dans l’espace minéral de nos villes déverdies, çà et là. Joël Hubaut, à Angers, plante des légumes comestibles dans les jardinières municipales, et Maria Thereza Alves, dans plusieurs ports, installe des ballasts chargés de graines appelées à germer (Seeds of Change, à partir de 1999, divers lieux). Artists as Family, sur un mode collectif, organise des séances publiques de jardinage, à l’instar de Thierry Boutonnier, qui y ajoute une dimension cénobitique plus marquée : création collective consistant en la sélection d’espèces, la plantation en commun, l’entretien des zones plantées, la récolte des fruits et leur consommation publique le cas échéant, l’organisation de pépinières de plantes en voie de raréfaction avec des services municipaux, la réflexion sur la domestication et ses conséquences.
L’artiste-planteur est, au sens saint-simonien, un organisateur ou plutôt, un réorganisateur : il restitue aux milieux malades de l’anthropisation une qualité naturelle perdue, rendue défaillante par l’impéritie humaine et l’indifférence excessive aux écosystèmes environnementaux. Un ouvrage correctif que le sien. Non planter pour planter, mais pour réinstaurer des îlots de matière vivante, à la manière dont un Francis Hallé, ce serviteur des arbres, s’attache aujourd’hui à reconstituer une forêt primaire, de celles que la fréquentation et l’exploitation humaines ont ruinées et fait quasiment disparaître de la surface de la Terre 15. Cette action, sans doute, n’est pas suffisante, et comment le serait-elle à l’heure de la déforestation galopante et de la « jardinisation » sous contrôle du monde (comprendre, l’horticulture généralisée et son corollaire, le refus de laisser à la nature son droit d’expression, le rejet massif du « sauvage »). Elle s’inscrit exemplairement, toutefois, dans cette entreprise salutaire consistant à récréer des « refuges », des poches de revitalisation végétale et, partant, écosystémique (la plante, donc le sol, avec l’humus, et l’air, avec l’atmosphère).
En l’occurrence, il importe d’envisager l’art de la plantation dans l’optique de ce que certain·e·s théoricien·ne·s dénomment le « plantationocène »16, un terme venant s’ajouter voire remplacer celui d’anthropocène pour qualifier les méfaits de l’exploitation humaine des écosystèmes, engagée par l’ère néolithique (invention de l’agriculture) et intensifiée, à partir des temps modernes, par l’augmentation démographique puis l’entrée dans l’âge technoindustriel et consumériste (« Grande accélération 17 »). Plantationocène ? Yves Citton et Jacopo Rasmi définissent celui-ci, au plus court, comme un système de prédation généralisée : « Son caractère principal est la destruction d’écosystèmes complexes pour mettre en place une monoculture, où les humains et autres êtres vivants se trouvent réduits au statut de ressources à exploiter selon des logiques extractivistes. L’extractivisme se caractérise par la mise en place de techniques d’extraction sélective de certains éléments d’un écosystème complexe, en les traitant comme des “actifs’’ dans lesquels s’investissent des anticipations de profits financiers. » Et de préciser, quant à la nature irresponsable de cet extractivisme : celui-ci opère « sans se soucier des nécessités (temporelles) de renouvellement des ressources ainsi exploitées, ni des conséquences de cette exploitation sur les environnements qui s’en trouvent affectés 18 ». Le plantationocène ou, en coeur de processus, une monoculture, un épuisement des ressources, une nuisance environnementale et par extension, sociale, humaine, générale.
Remailler
Un art de la plantation se piquant d’être responsable (écoresponsable) doit prendre en compte tout ce que détruit et qu’a détruit par le passé le plantationocène et ce, dans une perspective ré-enrichissante. Pas question de persévérer dans cette direction maligne et destructrice : le rétropédalage est de principe.
Pour cette raison essentielle : l’impératif de remailler, de réancrer le sujet humain dans la biosphère, de lui réapprendre — de nous réapprendre — la commensalité généralisée. Il n’y a pas l’homme et le reste des choses, dans une perspective cartésienne. Il est temps d’admettre, au contraire, l’interconnexion de tout avec tout, dirait un Timothy Morton 19. Il y a le cosmos, la Terre et nous, humains, en lui, à titre de constituants, aujourd’hui des parasites essentiellement, demain peut-être (c’est souhaitable) des commensaux. Vivre en bonne intelligence avec l’air, avec les forêts, avec l’humus, avec le fond du ciel, avec le kilogramme de bactéries qui s’active dans nos viscères commande de réviser notre position même dans l’univers. Voici définie la perspective.
éditions Louison, coll. “Dissidents” dirigée par Guillaume de Sardes. Parution : juin 2022
Que reste-t-il de l’œuvre d’Helmut Newton, le plus célèbre des photographes du corps féminin? Jusqu’à sa mort, en 2004, il fit scandale avec ses nus provocateurs et fétichisés, ses mises en scène fantasmées de bordel pour riches et son assujettissement à une esthétique glamour subtilement poussée aux limites du vulgaire. Mais le temps a passé, l’œil s’est habitué aux images équivoques, la pornographie s’est banalisée. Fin de l’histoire ? On discerne mieux, à présent, quel héritage que nous laisse le théâtre iconographique de Newton riche de sa légion de femmes invariablement dominatrices : le portrait en creux d’une masculinité sûre de ses repères, d’avant le « trouble dans le genre », telle que la modernité finissante en écrit le récit non encore biaisé de toutes parts. La fin d’un temps. Newton, plus qu’il ne photographie des femmes, scénographie les jeux complexes de la virilité avec son sujet d’élection et de toujours, la femme servie sur un plateau, rendue disponible, nécessaire, malléable, utile. Cette pratique ostensiblement masculine de l’art n’est pas ennemie de la féminité. Amie-ennemie et complice-maîtresse, elle célèbre le féminin pour mieux garantir et réassurer le masculin, assumé, en dépit des apparences, comme une position de force.
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SAMEDI 29 MAI / GALERIE ANALIX FOREVER
17:00
Conférence de Paul Ardenne, historien de l’art et écrivain, à propos de l’œuvre de Véronique Caye : « Jusqu’à la pointe extrême de la sensibilité informée »
Tout entière, l’entreprise artistique de Véronique Caye se rassemble autour d’une obsession, celle de la vera icona, l’« image vraie », de l’image qui devient le vrai. Ses productions existent à cette fin : faire de l’image non un reflet, un simulacre, ce qu’elle est traditionnellement, mais un vecteur de sens.
À la galerie Analix Forever, Véronique Caye montre pour la première fois ses travaux plastiques dans une exposition personnelle. Courtes vidéos et films intimes forment le socle de cette production « hors scène », inédite. Capture brute du visible, poèmes visuels, pensée mise en images et en texte. Les fédèrent cette stratégie, faire glisser l’image de son statut premier, l’artifice, à celui de vecteur apte à capter, à sécréter l’intelligible.
Plus d’information : https://analixforever.com/horizon-veronique-caye
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Tous deux émus par la crise sanitaire liée au virus COVID-19, Paul Ardenne et Alfonso Femia engagent un dialogue franc questionnant les conséquences de la pandémie sur les habitats, les lieux de vie, de travail, de soin, de repos.
Se définissant volontiers comme un architecte de la générosité, Alfonso Femia en appelle désormais au développement d’une architecture du soin. Cette approche humaniste, soucieuse non plus seulement du bien-vivre des habitants mais aussi du bien-être des individus, impose aux architectes une mission longtemps sacrifiée : soigner, prendre soin, et notamment des défavorisés, des malades, des isolés, des jeunes et des aînés.
Comment offrir une architecture adaptée attachée à satisfaire et prendre soin de chaque individu ? Que pourrait être un bâtiment protecteur ? Portés par leurs convictions et leurs visions de l’architecture, Paul Ardenne et Alfonso Femia tentent dans cette conversation de proposer des pistes pour construire le logement, l’école ou l’hôpital de demain.
Parution : avril 2021
Editions Ante Prima Consultants
par Jean-Paul Gavard-Perret
Dès le début du livre tout est en place : Le Bien n’a pas de sexe. C’est pas une robe un jour et un pantalon un autre jour, le Bien. C’est unisexe, le Bien avec majuscule. Tu le sers, le Bien, la Bien, que tu portes une paire de couilles ou que tu portes des seins c’est idem […] Tu vas au Bien avec majuscule comme l’eau du fleuve Charente va à la mer.
À partir de cette pétition de principe quatre amis d’un village perdu du sud-ouest de la France décident tels les trois Mousquetaires de servir la cause du bien. Du Bien avec une majuscule.
Le quatuor multiplie les bonnes actions sans jamais se ménager. Et ce jusqu’au paroxysme dans ce qui devient leur combat et leur religion. Devenus adultes ils s’engagent dans le SSA, le Service de Santé des Armées. Ils sont adoubés soignants en uniformes, “Pro Patriae et Humanitate”.
Mais c’est là que le bât blesse. Leur amour absolu du Bien et de la « soignure » tourne au carnage. Ils deviennent des anges exterminateurs hors de contrôle. Et ce livre écrit durant le Grand Confinement du printemps devient un miroir sur fond de mise en danger universel de la vie humaine – et pas uniquement au nom de la pandémie.
Le roman prend la forme d’un rapport des minutes de l’entretien avec ses juges qu’un des 4 “sauveurs” moralistes – Georges O. – effectue en prouvant qu’il ne peut y avoir d’exception à la règle que les combattants se sont fixés.Le narrateur a préféré supprimer les questions car elles n’apportent rien sinon révéler mon état d’hébétude , écrit-il à la fin de son état des lieux. Il illustre de facto qu’il n’existe pas de degrés dans la monstruosité. Ce qui n’empêchera pas à Georges O de finir sans avoir quitté son mitard. Mais il restera innocent à ses propres yeux.
Pour lui comme pour ses comparses, pas besoin de chercher midi à quatorze heures. Seul leur “droit” compte. Ses accidents de parcours et le sang qui coule pour le défendre resteront lettres mortes. Ils demeureront donc émissaires du Bien le plus pur. Et ça fait froid dans le dos.
A lire en ligne ici
Paul Ardenne, L’ami du Bien, Le Bord de l’Eau, Bruxelles, octobre 2020, 128 p.-, 15 €
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par Philippe Manche
À L’OCCASION DE LA SORTIE DE L’OUVRAGE INCORRECT, QUI RETRACE L’IRRÉVÉRENCE DANS LA FRANCE DES ANNÉES 70 ET 80, L’ÉCRIVAIN ET HISTORIEN DE L’ART PAUL ARDENNE ET QUELQUES AUTRES (JEAN-YVES LAFESSE, JAN BUCQUOY) S’INTERROGENT SUR LA DISPARITION DU POLITIQUEMENT INCORRECT ET LE RISQUE POUR NOS DÉMOCRATIES VACILLANTES.
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Il est ici question d’un gorille ! Un gorille de pierre ! Un gorille du pape !
Alexandre Brétinière, photographe, a suivi toutes les étapes de la création de la sculpture « Cœur de primate » de Matthieu Faury. Celle-ci ressuscite pour l’été, l’ancienne ménagerie des papes en s’exposant à Avignon, dans le jardin du palais nouvellement réhabilité.
Ce livre raconte cette histoire et montre les photos N/B qui en sont issues. L’historien de l’art Paul Ardenne a été invité à nous parler de la figure du gorille dans l’art contemporain, et c’est passionnant !
Matthieu Faury est un artiste plasticien principalement connu pour ses sculptures, dessins et installations. Il a réalisé de nombreuses expositions dans le sud de la France, notamment au Pont-du-Gard en 2010, à Tarascon (exposition Si les châteaux m’étaient contés en 2015) et à Avignon (Cœur de primate, dans le jardin du Palais des papes en 2020).
Alexandre Brétinière est photographe. Il est l’auteur de deux livres de photos, Avignon, mon amour (2018, éditions du Chassel) et Douces cadences (2019, éditions Marion Charlet).
Paul Ardenne est écrivain et historien de l’art. Il est notamment l’auteur de Art, le présent (2009, Regard) et de Un Art écologique (2018, BDL). Il a été le commissaire de l’exposition Humanimalismes en 2020 à Paris.
https://www.franceculture.fr/personne-paul-ardenne.html
CONTACT éditrice : Marion Charlet
06 77 06 63 97 – marioncharlet@icloud.com
Les Éditions Marion Charlet
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